Réforme du chômage – transfert de charge

“Le fédéral joue avec le feu. Nous devons éviter l’asphyxie des CPAS bruxellois.”

Trois jours après le comité de concertation (Codeco) sur la réforme fédérale du chômage, Bernard Clerfayt, Ministre bruxellois des Pouvoirs locaux, réitère : il exige du fédéral des compensations claires et suffisantes pour éviter la désorganisation des CPAS à Bruxelles. Une table ronde régionale emploi, réunissant les CPAS, Bruxelles Formation et Actiris, s’est tenue hier pour coordonner la réponse des parties prenantes.

UN MANQUE DE CONCERTATION ET DE TRANSPARENCE INQUIÉTANT

Bernard Clerfayt dénonce l’absence totale de concertation sur les compensations promises aux CPAS :

  • Le cabinet bruxellois a dû réclamer à deux reprises (CIM des 16 juin et 1er juillet) d’être invité au groupe de travail CPAS piloté par la ministre Van Bossuyt, une demande également formulée par les autres Régions.
  • Ce n’est qu’après insistance que la participation bruxelloise a été acceptée le 1er juillet. L’invitation à la réunion du 15 juillet n’a été reçue que le 9 juillet.
  • À ce jour, aucune information n’a été fournie sur la répartition des 234 millions d’euros annoncés, ni sur les critères d’accès à ces compensations.

“Le fédéral joue la montre, alors que les CPAS doivent déjà préparer leurs budgets pour 2026. Cette absence de visibilité est irresponsable”, déplore Bernard Clerfayt.

UN AFFLUX MASSIF ET DES MOYENS INSUFFISANTS

Selon les estimations du cabinet Clerfayt (scénario moyen) :

  • 13.000 nouveaux usagers pourraient frapper aux portes des CPAS dès 2026.
  • Cela représenterait une hausse de 28 % en un an du nombre de bénéficiaires du RIS (Revenu d’intégration social).
  • Le coût pour les CPAS atteindrait 134 millions d’euros :
    • 72 millions pour les RIS
    • 24 millions pour le personnel supplémentaire
    • 38 millions pour des aides sociales complémentaires

On estime à environ 390 équivalents temps plein (ETP) les besoins supplémentaires en personnel – assistants sociaux, agents administratifs et conseillers en insertion socio-professionnelle. La Fédération des CPAS, elle, évalue ces besoins à 551 ETP.

Or, le secteur fait déjà face à une pénurie chronique d’assistants sociaux. « Comment recruter dans un métier en tension depuis des années à Bruxelles ? », alerte le ministre.

DES PRÉCÉDENTS QUI INQUIÈTENT ET DES PROFILS ÉLOIGNÉS DE L’EMPLOI

La réforme de 2015 avait déjà montré ses limites : davantage de précarité et aucun effet significatif sur le retour à l’emploi. Le profil des futurs exclus renforce l’inquiétude :

  • 60 % sont au chômage depuis plus de 5 ans
  • 63 % ont un faible niveau de qualification ou un diplôme étranger non reconnu
  • Beaucoup cumulent barrières linguistiques, sociales ou de santé

LES REVENDICATIONS DE BERNARD CLERFAYT

  • Porter le taux de remboursement du RIS à 95 % (contre 70 % actuellement), comme le demande la Fédération des CPAS
  • Octroyer des moyens humains et structurels accrus pour permettre aux CPAS d’absorber le choc
  • Supprimer l’obligation de résultats en matière d’insertion, qui risquerait de pénaliser les CPAS
  • Ne pas conditionner les compensations à la signature de projets individualisés d’intégration sociale (PIIS)

“Sans un engagement clair et chiffré, les CPAS risquent d’étouffer sous la charge. Ils ne peuvent pas être les variables d’ajustement d’une réforme fédérale”, conclut Bernard Clerfayt.